Malgré d’énormes progrès enregistrés contre l’infection au VIH, de nombreux efforts restent à accomplir, tant du côté de l’innovation scientifique et médicale que dans le déploiement des outils de dépistage et de prévention, selon le Pr Yazdan Yazdanpanah, directeur de l’ANRS-MIE.
« Pour la décennie à venir, les deux défis à relever sont ceux de l’innovation et de l’implémentation ». En ouverture du colloque « Ensemble pour l’éradication du VIH », organisé par Pharmaceutiques ce 29 mars 2022 (1), le Pr Yazdan Yazdanpanah, directeur de l’ANRS – Maladies infectieuses émergentes (2), a mis l’accent sur les progrès qui restent encore à accomplir dans la lutte contre cette infection. Certes l’incidence diminue, ainsi que la mortalité, grâce aux traitements. Mais le nombre de personnes vivant avec le VIH continue d’augmenter, du fait de nouvelles contaminations – un à deux millions par an au niveau mondial. « Même en France, on enregistre encore 5 000 à 6 000 nouveaux cas par an », alerte l’infectiologue. Et encore 500 000 à un million de personnes décèdent chaque année dans le monde.
Vaccin et guérison
Sur le volet de l’innovation, l’objectif n°1 reste la découverte d’un vaccin efficace. L’ANRS-MIE participe actuellement à deux essais cliniques, respectivement sur des candidats-vaccins préventif et thérapeutique. Pour le Pr Yazdanpanah, si la mise au point rapide d’un vaccin contre le SARS-CoV-2 a clairement bénéficié de décennies de recherche vaccinale contre le VIH, la réciproque ne sera pas forcément vraie : « Ce n’est pas le même virus », insiste-t-il. Impossible par exemple de présupposer que la technologie de l’ARNm obtiendra le même succès contre le VIH que contre le coronavirus.
Parallèlement à cette recherche d’un vaccin, c’est bien sur la guérison ou la rémission à long terme des personnes infectées que portent aujourd’hui les efforts, sur deux axes : cibler les réservoirs viraux et booster l’immunité. L’ANRS-MIE travaille également sur ces thématiques, notamment dans le cadre du consortium multidisciplinaire Rhiviera.
Mieux dépister et prévenir
Au-delà de l’innovation scientifique, l’autre défi est celui de la mise en œuvre des stratégies TasP (« treatment as prevention ») et PrEP (« pre-exposure prophylaxis »). Le concept de la TasP est qu’une personne infectée traitée tôt voit rapidement sa charge virale devenir indétectable et ne peut donc plus transmettre le virus. « Problème : 26 % des personnes sont dépistées à un stade avancé de la maladie », souligne le Pr Yazdanpanah. Quant à la PrEP, « seules 42 000 personnes en France ont initié un protocole entre janvier 2016 et mi-2021, ce n’est pas assez », note l’infectiologue, qui incite à élargir les populations ciblées. « Nous disposons aujourd’hui des outils pour réussir : nous vivons une révolution technologique. »
Julie Wierzbicki
(1) Colloque organisé avec le soutien de MSD et de ViiV Healthcare
(2) L’Agence nationale de recherche sur le Sida et les hépatites virales (ANRS), créée dès 1988, a cédé la place à une nouvelle agence aux missions élargies, l’ANRS – Maladies infectieuses émergentes, au 1er janvier 2021.