Après le cancer du sein, la reconstruction mammaire représente souvent un nouveau chemin de croix pour les patientes. Infection, hématome, ecchymose, épanchement et tout types de douleurs peuvent conduire à passer plusieurs fois sur le bloc opératoire et atteindre la dignité des patientes. La peur des complications pousse même de nombreuses femmes à renoncer à retrouver leur intégrité physique post-cancer.
Sous-médiatisé, ce problème est un enjeu de santé publique important. Selon les données de l’OMS, 2,3 millions de femmes ont été diagnostiquées en 2020 sur la planète comme souffrant d’un cancer du sein. Et toujours selon les mêmes sources, une femme sur 12 développe un cancer du sein au cours de sa vie.
« La moitié de ces femmes subit une mastectomie (ablation d’un sein NDLR) et seulement la moitié d’entre elles choisit ensuite la voie de la reconstruction mammaire. Pourquoi ? Parce que les solutions actuelles ne sont pas jugées satisfaisantes. Les prothèses mammaires sont associées à des complications, la chirurgie (lipofilling ou prélèvement de tissus sur une autre partie du corp) est contraignante et ne fonctionne pas pour toutes les femmes », note Sophie Brac de la Perrière, la fondatrice et CEO de Healshape.
Un sein naturel grâce à l’impression 3D
L’ex-directrice du service client international de Sanofi Pasteur a donc créé la startup Healshape en janvier 2020 pour changer la vie de ces patientes et permettre aux survivantes de cancers du sein de retrouver plus facilement leur corps d’avant. L’entrepreneuse s’est associée dans sa quête avec cinq experts dans différents domaines : pharmacie, ingénierie tissulaire, chirurgie, biotechnologie et impression 3D.
Leur objectif : transposer un brevet de bio-impression déposé par le laboratoire 3D Fab, spécialiste de l’impression 3D, et la startup Labskin (ingénierie tissulaire), en innovation possiblement révolutionnaire pour des millions de femmes dans les années à venir.
L’équipe, soutenue par l’incubateur féminin lyonnais Pulsalys, a développé une bioprothèse permettant de régénérer de manière naturelle le tissu du sein. « Il s’agit d’une matrice poreuse, fabriquée à partir de matériaux naturels et imprimée selon la morphologie de la patiente. Cette matrice est très proche du tissu humain, elle est autoportante et se comporte de manière naturelle », détaille Sophie Brac de la Perrière.
« Cette bioprothèse recrée un environnement favorable permettant aux cellules de se développer, après une étape intermédiaire de lipofilling (prélèvement de graisse à un autre endroit du corps). Peu à peu, en un an environ, la matrice disparaît complètement au profit des tissus naturels qui se sont régénérés », ajoute-t-elle.
Une levée de fonds de 6 millions en cours dans les tuyaux
Grâce à divers financements non dilutifs, un million d’euros au total (Bpifrance, Région Aura, Pulsalys, Métropole de Lyon), la biotech emploie déjà trois personnes. Elle a réalisé des tests in vivo et in vitro.
Pour avancer vers les études pré-cliniques et vers une première étude clinique, elle est actuellement en discussions avancées avec des investisseurs (encore confidentiels) pour une levée de fonds de six millions d’euros.
Un deuxième tour de table, d’une envergure plus importante, devrait être réalisé d’ici à trois ans. Objectif visé : un chiffre d’affaires de 140 millions d’euros à l’horizon 2030, sur un marché mondial estimé à un milliard d’euros.
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Le prix “10.000 startups pour changer le monde” est le plus grand concours de startups en France. Il est organisé par La Tribune en partenariat avec BNP Paribas, la Mission French Tech, Bpifrance, Business France, le ministère de l’Outre-Mer, Dalkia et l’Ordre national des experts-comptables.
“10.000 startups pour changer le monde” récompense depuis 10 ans les startups françaises les plus prometteuses dans six catégories qui incarnent les défis de demain : Environnement & Energie, Industrie du futur, Data & IA, Smart tech -innovations d’usage-, Santé et Start -pépites en phase d’amorçage. Lors d’un tour de France entre janvier et mars dans 8 métropoles françaises (Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Paris, Strasbourg et Lille), son jury d’experts et de journalistes a récompensé dans chaque région 6 startups, une par catégorie, soit 48 lauréats régionaux.
Ces gagnants se sont affrontés en finale le 14 mars en Paris, pour désigner parmi eux 9 grand prix nationaux : un par catégorie, ainsi qu’un prix Coup de Coeur, un prix Impact et un prix International. Un 10è prix a également été décerné à une startup des Outre-Mer, parmi trois pépites primées à La Réunion, dans la zone Caraïbes (Guadeloupe, Martinique, Guyane française) et dans la zone Polynésie (Tahiti, Nouvelle-Calédonie). Les 10 prix ont été remis le 28 mars 2022 au Grand Rex de Paris. Après sa victoire lors de la sélection régionale de Lyon, Healshape est le grand lauréat national dans la catégorie Santé.
Stéphanie Gallo Triouleyre
30 Mars 2022, 6:11
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