Sanofi : chronique d’un gâchis pharmaceutique Leave a comment

Dossier : Relocaliser ne suffit pas

Plus de dix milliards de doses de vaccin ont été inoculées en deux ans de pandémie. Parmi les dix sérums validés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), aucun n’a été conçu par le laboratoire Sanofi. Pour les salariés de l’entreprise, cet accident industriel apparaît d’autant plus douloureux qu’il était prévisible.

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Dominique Dubois. – « Rouge », 2009

© Dominique Dubois – dominique-dubois.com

«Tous les Français ont été comme moi traumatisés par cette affaire : c’est l’abaissement des moyens depuis trente ans sur l’innovation dans la recherche en santé qui a abouti à ce qu’on ne fasse pas de vaccin français… », reconnaissait M. Jean Castex lors d’un déplacement en Alsace, le 28 janvier dernier. « Ce n’est plus possible ! Il faut réinvestir massivement, poursuivait le premier ministre. On va créer une Agence de l’innovation en santé. Il faut réimplanter en France la fabrication. C’est aussi une question de souveraineté. »

Rompant avec les discours triomphalistes de l’entreprise ou du président de la République au début de la pandémie de Covid-19, ce constat amer rejoint celui des salariés de Sanofi, qui emploie plus de cent mille personnes, dont vingt-cinq mille en France. Ici, nombreux sont las des réorganisations successives, de la sous-traitance dans tous les domaines, mais aussi de l’absence de reconnaissance. Dans notre service de recherche et développement par exemple, beaucoup regrettent des décisions aberrantes, sans concertation, qui ne tiennent pas compte de leur expertise.

Fort de son image de numéro un mondial des vaccins pédiatriques et grippaux, Sanofi espérait jouer un rôle majeur dans la lutte contre le virus SRAS-CoV-2, en attirant en premier lieu les aides d’États aux abois face à la crise sanitaire. Dès le 18 février 2020, l’entreprise commence à collaborer avec les autorités américaines. Le 13 mai 2020, le Britannique Paul Hudson, directeur général du groupe depuis septembre 2019, déclare qu’il servira les États-Unis en premier, puisque Washington soutient ses recherches. Au pays de Pasteur et alors que les investisseurs institutionnels français détiennent encore 15 % du capital de l’entreprise, ces déclarations obligent le gouvernement à garantir qu’un libre accès du vaccin à tous « n’est pas négociable ». Le lendemain, M. Hudson s’adresse à l’Europe en expliquant que Sanofi « a besoin de partager les risques » pour produire les (…)

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