Le trouble bipolaire est l’une des pathologies psychiatriques les plus fréquentes.
Caractérisée par une fluctuation de l’humeur (avec alternance d’épisodes dépressifs ou maniaques/hypomaniaques et des périodes de rémission), cette maladie entraîne des répercussions majeures pour le patient tant sur le plan de sa santé que dans sa sphère privée et professionnelle. Elle reste aujourd’hui vivement stigmatisée. Explications avec le Dr Joyce Demey, psychiatre à la Clinique de Beaupuy (Ramsay Santé) située en Haute-Garonne.
La Journée mondiale des troubles bipolaires (qui touche 1 à 2,5 % de la population en France, soit entre 650 000 et 1 600 000 individus) est célébrée le 30 mars, jour de l’anniversaire du peintre néerlandais Vincent van Gogh, diagnostiqué à titre posthume comme porteur probable de la maladie. L’objectif de cette journée est de sensibiliser le grand public à ce trouble afin d’éviter la stigmatisation sociale. Un défi important pour les professionnels de santé, les patients qui en souffrent et leurs proches.
Comprendre le trouble bipolaire
Le trouble bipolaire est une pathologie psychiatrique chronique dont la cause exacte reste inconnue. Elle peut être liée à la génétique avec une forte prédisposition familiale. Des études récentes prétendent que l’origine des troubles bipolaires pourrait se trouver dans la perturbation d’une voie biochimique cérébrale.
Il existe deux types majeurs de trouble bipolaire, « le trouble bipolaire de type 1 qui se définit par la survenue d’un épisode de manie minimum, et le trouble bipolaire de type 2 caractérisé par l’association d’au moins une phase d’hypomanie (phase maniaque atténuée) et une phase de dépression », explique le Dr Joyce Demey. « Il s’agit d’un trouble grave qui conduit près d’un malade sur deux à réaliser des tentatives de suicide » insiste-t-elle.
Les symptômes du trouble bipolaire
Les symptômes de la phase maniaque (appelée « up ») sont généralement caractérisés par un état d’euphorie/exaltation, une accélération de la pensée et de la parole, une instabilité psycho-motrice, des périodes d’insomnie sans fatigue, une diminution du besoin de sommeil, des idées de grandeur et un sentiment de « puissance ». « Durant cette phase, les patients peuvent avoir des comportements « à risque » avec notamment la consommation massive d’alcool, de drogues, des achats compulsifs et/ou une activité sexuelle augmentée », explique-t-elle.
Lors d’un épisode dépressif, les patients peuvent au contraire ressentir une forte tristesse, une anhédonie (perte de la capacité à ressentir du plaisir), avec une aboulie profonde (trouble de la motivation). Les pensées et le débit verbal sont cette fois-ci plus ralentis (fatigue générale (asthénie), perturbations des fonctions instinctuelles…).
Le diagnostic du trouble bipolaire
Généralement difficile à établir, le diagnostic du trouble bipolaire peut prendre une dizaine d’années (en moyenne) avant d’être clairement posé. Il convient d’éliminer en amont toutes les autres causes organiques ou même psychiatriques.
Les premiers symptômes apparaissent en moyenne entre 20 et 30 ans. L’histoire de vie de l’individu (qui en est potentiellement atteint) est un élément essentiel à prendre en compte lors d’un diagnostic. La récurrence des fluctuations thymique, l’anamnèse des antécédents personnels (épisodes maniaques/hypomaniaques ou dépressifs passés), les antécédents familiaux de troubles de l’humeur (ou de suicide) ainsi que l’absence de réponse au traitement antidépresseur peuvent notamment mener au diagnostic de ce trouble psychique.
Les traitements du trouble bipolaire
Le trouble bipolaire est une maladie chronique « mais il peut être géré de sorte que les patients qui en souffrent mènent une vie tout à fait normale » indique la spécialiste. Le traitement comprend la prise de médicaments régulateurs de l’humeur (lithium, acide valproique…), des thérapies associées si nécessaire, des séances de psychoéducation, le respect d’une bonne hygiène de vie impliquant parfois des changements de routine (sommeil, alimentation, pratique physique régulière, réduction du niveau de stress, arrêt de la consommation de substances psychoactives : caféine, amphétamines, alcool et drogues) .
Non traité, le trouble bipolaire a un impact important sur la vie des patients qui en souffrent et sur leur entourage. Cela peut aboutir à des situations d’isolement majeur. L’avancée des traitements (notamment médicamenteux) permet toutefois de réduire considérablement ces conséquences ainsi que le temps passé en hospitalisation (lorsqu’elle s’avère nécessaire).
Une information claire et complète sur le diagnostic et la prise en charge de la pathologie doit être apportée au patient et si possible à son entourage. « Un suivi médical régulier ainsi que le soutien et l’accompagnement des proches sont essentiels pour la prise en charge du trouble bipolaire », conclut le Dr Joyce Demey.