La déferlante de contaminations de Covid-19, qui se traduit par une ruée sur les tests, fait douter certains médecins de l’intérêt de poursuivre un tel dépistage massif, quand d’autres y voient encore une manière de freiner l’emballement épidémique.
Les scènes se répètent depuis des semaines maintenant: dès l’aube, des queues se forment devant les laboratoires d’analyses médicales et les pharmacies pour faire le test qui donnera un résultat “positif” ou “négatif”.
Les chiffres de la vague actuelle, portée par un variant Omicron extrêmement contagieux, ont de quoi donner le tournis: un nombre de contaminations record accompagné d’un nombre de tests jamais vu: plus de 8,3 millions réalisés la semaine dernière.
Au point que certains se demandent si à ce stade de l’épidémie, il est nécessaire de poursuivre cette politique de dépistage massive, très coûteuse et compliquée à organiser.
“Les tests à grande échelle sont probablement inutiles désormais”, tranche auprès de l’AFP le médecin urgentiste Yonathan Freund. “Est-ce que faire plus d’un million de tests par jour limite la circulation du virus? Je ne le crois pas, ou alors à la marge”.
Aujourd’hui, “il est trop tard, on a perdu le contrôle, il faut accepter le fait que le virus va circuler”, poursuit-il.
Un pavé dans la mare? “Beaucoup pensent la même chose mais le sujet est encore tabou”, estime-t-il.
– “Frein moteur” –
Cette vision ne semble en tout cas pas partagée pas différents épidémiologistes qui voient dans les tests un outil indispensable de suivi de la pandémie.
Mais aussi et surtout une manière, parmi d’autres, d’endiguer sa progression.
“Avant, un cas contact devait s’isoler, maintenant que ce n’est plus la règle, c’est important de savoir si on est porteur du virus ou non”, relève l’épidémiologiste Pascal Crépey. “Les tests, ce n’est pas un frein à main qui permet de stopper la voiture, mais ça reste un frein moteur.”
Et selon lui, “il est faux de dire que tout le monde sera contaminé par Omicron quoiqu’il arrive”.
Car tout dépend de la capacité de reproduction du virus qui peut être limitée par une combinaison de mesures. Le dépistage en fait potentiellement partie même si, comme toute autre mesure, il n’est pas efficace à 100%.
Cette capacité de reproduction est très importante mais reste à préciser car, à ce stade de l’épidémie, de nombreuses incertitudes demeurent autour du variant Omicron.
“On ne connait pas encore assez sa contagiosité, ni ses conséquences, pour se permettre de modifier la stratégie de dépistage”, estime le professeur en épidémiologie Mahmoud Zureik.
“S’il s’avère que si ça devient un virus endémique comme le rhume, la question de la pertinence des tests va se poser, mais on n’en est pas là”.
– “Mieux que rien” –
Si les tests de dépistage restent aux yeux de certains pertinents, encore faut-il qu’ils soient accessibles et réalisés dans le bon timing.
Or, “on est dépassé, on arrive aux limites du système”, souffle Jérôme Grosjean, biologiste médical.
“L’autre problème, c’est que tous les tests sont un peu mis sur le même plan aujourd’hui mais ils n’ont pas la même valeur prédictive”, ajoute-t-il.
De nombreuses personnes privilégient désormais les tests antigéniques, accessibles sans rendez-vous, pour un résultat plus rapide mais moins fiable que les tests PCR, plus difficiles d’accès.
Depuis plusieurs jours, les autotests sont aussi pris d’assaut: mais là encore, le résultat est moins fiable qu’un PCR et le risque d’erreur de manipulation possible.
La Haute autorité de santé (HAS) a récemment estimé qu’aucun élément probant ne démontrait une perte de sensibilité clinique des tests antigéniques et autotests pour la détection du variant Omicron, recommandant l’extension de leur utilisation chez les personnes cas contact.
“Un autotest négatif ne doit pas rassurer à 100%”, résume Jérôme Grosjean. Mais c’est toujours “mieux que rien”.