Comment l’hôpital Foch lutte contre les lombalgies des soignants grâce à l’exosquelette de Japet Leave a comment

Les troubles musculo-squelettiques (TMS) – un ensemble de maladies localisées au niveau ou autour des articulations – restent la première cause d’arrêt de travail et d’inaptitude chez le personnel soignant. Cette problématique a été prise très au sérieux par l’hôpital Foch, un établissement privé à but non lucratif situé à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine. En janvier 2021, il a acquis quatre exosquelettes développés par Japet pour lutter contre la lombalgie (douleur située en bas du dos).

Un exosquelette sous forme de ceinture
Cette start-up lilloise a été fondée en 2015 par Damien Bratic, ingénieur spécialisé dans le rachis, Antoine Noel, ingénieur robotique spécialisé dans les exosquelettes, et Amélie Blondeaux, designer produit dont la famille proche avait été lourdement impactée par la lombalgie. Ils ont créé “Japet.W”, un exosquelette sous forme de ceinture lombaire dédiée à la prévention et la diminution de ces douleurs.

Japet.W est constitué de “quatre blocs moteurs” qui “redressent la colonne vertébrale pour amortir les chocs, à la manière des suspensions d’une voiture“, détaille Anaïs Schoreel, product integration et sales manager au sein de l’entreprise, à L’Usine Digitale. Il n’allègue pas le poids ressenti de la charge portée mais limite l’impact des manutentions de charges sur les lombaires. Il est capable d’absorber “40% des chocs” et est livré avec deux batteries ayant chacune une autonomie de 7 heures en utilisation continue. Il pèse moins de deux kilogrammes.

Un coût de 7000 euros
Disponible en deux tailles, il coûte 6000 euros et est délivré avec un “forfait intégration” de 1000 euros. Celui-ci comprend “la formation, l’installation et la désinstallation” ainsi que “le suivi de l’intégration” sous la forme d’appels deux jours, deux semaines et un mois après la mise en marche. A noter que les standards de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) indiquent une période de 30 jours pour une intégration complète.

Dans certains cas, l’établissement utilisateur peut bénéficier d’aide au financement, en particulier dans le cadre du maintien à l’emploi de travailleurs en situation de handicap.

La phase d’intégration est au cœur des projets de déploiement d’exosquelette. En effet, l’acceptation de porter un tel équipement au quotidien n’est pas naturel. C’est ce qui ressort du témoignage d’Amrei Sorais, référente prévention TMS au sein de l’hôpital Foch. “En première intention, les quatre exosquelettes s’adressaient au secteur de la réanimation” engorgé par la pandémie de Covid-19. Ils devaient répondre à la problématique du retournement en décubitus ventral, une technique permettant d’améliorer la respiration des patients en leur offrant une meilleure ventilation des poumons.

Or, surchargés de travail, les soignants “ne pensaient pas à leur mal de dos mais à la prise en charge des patients“, raconte Amrei Sorais, kinésithérapeute de formation. L’un des exosquelettes a finalement été adopté par “un jeune homme” chargé du montage du mobilier au sein de l’hôpital. “Il a bien su s’approprier la notion de prévention“, ajoute-t-elle.

Un bilan mitigé
Les ceintures robotisées ont également été testées par les 11 soignants de l’unité gériatrique, spécialisée dans la prise en charge des personnes âgées, entre mai et octobre 2021. Obligés à se pencher souvent, ils sollicitent beaucoup leurs dos. Le bilan est assez mitigé. Certains ont mis en avant le fait que Japet.W permettait de “garder une meilleure posture“, d’autres ont noté “une diminution de la fatigue” et “un soulagement de la douleur“. “C’est l’essence même du rôle de cette ceinture“, résume Amrei Sorais.

Mais ils ont également soulevé des points négatifs parmi lesquels l’inconfort du port du dispositif en cas de forte chaleur, le manque d’hygiène à cause de la transpiration (un spray désinfectant est livré avec le produit), l’encombrement, le regard des familles de patients…

Ce n’est encore pas du tout rentré dans les mœurs. Nous étions obligés de constater que les inconvénients prévalaient sur les aspects positifs“, regrette Amrei Sorais qui reste persuadée des bienfaits de cet équipement pour protéger la santé au travail. Elle ajoute qu’il est “compliqué de changer les habitudes de travail“.

Une étude pour attester de l’efficacité de Japet.W
Mais l’hôpital Foch veut continuer son projet et a lancé une étude avec son service de recherche clinique. “A l’origine, nous ne voulions pas sélectionner des utilisateurs pour ne pas créer une stigmatisation” par rapport à un état de santé particulier, explique la référente prévention. Elle souhaite désormais utiliser des “critères d’inclusion plus spécifiques sur la base du volontariat“. 

L’étude vise ainsi à obtenir “une mesure objective de la charge physique au niveau de la région lombaire” avec et sans exosquelette. Le but : “disposer d’un argument supplémentaire auprès des soignants” du bien-fondé du dispositif.

L’epineuse question de l’acceptabilité
Comme l’explique Anaïs Schoreel, l’acceptabilité de Japet.W est plus rapide pour une personne ayant déjà une pathologie car elle en voit immédiatement les bénéfices. Le service Recherche & Développement de l’entreprise lilloise prend évidemment en compte les retours des utilisateurs. Néanmoins, étant certifiés CE, les produits ne sont pas rapidement modifiables car chaque changement nécessite une nouvelle labélisation par un organisme compétent.

Les exosquelettes ne sont pas encore dans une phase de déploiement“, analyse Anaïs Schoreel. “C’est un nouvel outil. Il faut apprendre à travailler avec !“, ajoute-t-elle. A date, plus de 400 Japet.W ont été commercialisés, majoritairement en France. Ils sont utilisés dans divers secteurs, tels que le BTP, l’industrie, la logistique, l’agroalimentaire…

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